Phénomène des piqûres sauvages: psychose générale ou véritable fléau?

En Belgique et en France, de plus en plus de jeunes affirment ces dernières semaines avoir été victimes de piqûres sauvages. Frôle-t-on la psychose générale ou s’agit-il d’un mauvais délire qui reste marginal?

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Plusieurs arrestations

Avant de commencer, soyons clairs : le phénomène des piqûres sauvages lors de soirée est bel et bien réel. Les témoignages sont nombreux et des médecins ont confirmé les piqûres. Parallèlement, plusieurs personnes ont déjà été arrêtées. C’est notamment le cas en France. Mardi soir, à Versailles, un homme a été interpellé en flagrant délit après avoir piqué deux jeunes filles. Des agresseurs ont également pu être filmés en train de piquer des victimes.

Des témoignages

En Belgique, une jeune femme a été piquée le 4 juin dernier lors de la soirée open air Piknik Elektronik. «Je n’avais bu que deux bières, je connais mes limites. Lorsque je me suis mise à danser avec mes amis, quelqu’un m’a touché au niveau du côté gauche (…) Je me rends compte qu’on m’a volé mon argent et mon GSM. Et puis, je me sens partir. Je tombe au sol. J’entends des voix autour de moi. Je lutte pour leur répondre. Mais, je me suis très bizarre, consciente et inconsciente à la fois», a-t-elle témoigné.

Des nombreuses autres victimes ont témoigné et porté plainte. Il ne s’agit donc pas d’un cas isolé. Il n’existe pas de chiffres pour la Belgique mais selon Le Monde, plus de 800 plaintes ont été déposées et 1.098 témoignages ont été recensés en France au 16 juin.

Quels sont les résultats des analyses?

La jeune femme a été emmenée à l’hôpital. Un médecin lui a indiqué qu’elle avait probablement été droguée par une piqûre mais «il s’agit d’une nouvelle substance indétectable». C’est d’ailleurs ce qu’il ressort de toutes les analyses de sang et d’urine menées à ce jour.

En France, où les faits sont plus plus nombreux qu’en Belgique, les analyses n’ont relevé « aucune trace de GHB », surnommé la « drogue du viol », et les victimes n’ont pas fait état d’actes « d’agression sexuelle ou de vol consécutifs à la piqûre », a fait savoir la Direction générale de la police nationale (DGPN).

Certains experts estiment que les substances injectées lors de ces piqûres sauvages pourraient déjà naturellement présentes dans le corps humain, comme l’insuline ou l’adrénaline. C’est la raison pour laquelle elles passeraient inaperçues dans les analyses.

Philip Hantson, professeur de toxicologie à l’UC Louvain, a confirmé à RTLinfo qu’il était peu probable que ces piqûres contiennent des produits dangereux. «Il faut choisir une aiguille d’un calibre extrêmement petit et fin, comme celle utilisée pour injecter de l’insuline. Ce n’est pas tout de choisir une aiguille, il faut encore adapter une seringue, choisir le volume à injecter, le type de produit. Ce fait beaucoup de conditions techniques avant même d’arriver à piquer un individu à son insu.», a-t-il indiqué.

Risque de VIH et de maladies

À l’heure actuelle, aucune des victimes de piqûre n’a été agressée ou violée. Par contre, le risque de transmission de VIH ou d’autres maladies est bien réel. C’est la raison pour laquelle il est important que les victimes se fassent dépister.

Quel est le but alors?

Qui se cache derrière les agresseurs? Pour l’instant, aucun profil ne semble se dégager. Quel est le but? Il semblerait que ce soit surtout des plaisantins qui veulent surfer sur le phénomène pour créer la psychose et créer un sentiment d’insécurité.

Dans les colonnes du Soir, le docteur Philippe Boxho, expert judiciaire et professeur en médecine légale à l’ULiège, a évoqué la possibilité de personnages «qui sont assez crétins, en lisant l’actualité, pour se dire que piquer les gens pour provoquer la panique». Il a également souligné que l’état de psychose qui règne pouvait entraîner chez certaines personnes «l’impression qu’elles ont été piquées alors que ce n’est pas le cas».

«Le principe est toujours le même: il y a sans doute quelques cas réels, ensuite cela prend de l’ampleur avec des cas non prouvés, puis il y a la reproduction pour obtenir la panique», analyse de son côté Aurore Van de Winkel, autrice du livre «Légendes urbaines de Belgique».

Des mesures sont prises

En attendant les organisateurs de soirées, de concerts et de festivals prennent le phénomène très au sérieux. Il faut dire que certaines personnes renoncent à sortir à cause de l’angoisse de ces piqûres sauvages. Pour les rassurer et garantir leur sécurité, des mesures sont mises en place. «On est très attentifs à comment la situation va évoluer sur les événements en Belgique et en France. Et nous serons prêts à réagir en collaboration avec la police et les secours s’il s’avère nécessaire de mettre quelque chose en place», a indiqué à Moustique Damien Dufrasne, président de la Fédération des festivals de musique Wallonie-Bruxelles et directeur du Dour Festival.

Le festival Les Ardentes se déroulera du 7 au 10 juillet est des mesures exceptionnelles seront mises en place. «Nous voulons éviter une phobie inutile. Si le problème se présente, des analyses seront effectuées directement sur place afin de déterminer si on est face à un produit dangereux ou à un malaise causé par l’ébriété ou encore autre chose», a indiqué le directeur du festival à Moustique.