Valérie Bonneton en religieuse dans ‘Juste Ciel’ : «Si on ne peut plus rire du Pape, autant fermer la boutique»

Avec le succès de la série ‘Fais pas ci, fais pas ça’ et de films comme ‘Les petits mouchoirs’ ou ‘La Ch’tite famille’, Valérie Bonneton est devenue un visage incontournable de la comédie française. On la retrouve en cheffe d’un gang de religieuses dans ‘Juste Ciel’ de Laurent Tirard ('Le Discours'), une comédie célébrant la (mauvaise) foi!

par
Stanislas Ide
Temps de lecture 5 min.

Vous vous lâchez complètement en religieuse dans ‘Juste Ciel’. Tout était permis sur le plateau?

Valérie Bonneton : «Absolument tout! Mais c’est vrai qu’avec des personnages de religieuses, de personnes dévouant leur vie à la foi, on a d’abord l’impression d’aller l’école. C’est-à-dire de devoir respecter des règles. Mais cette révérence qu’on pourrait avoir m’a donné une autre impulsion, celle de foncer droit dans les interdits. C’était très amusant car mon personnage se révèle vite assez médiocre. Sœur Véronique est ambitieuse, prête à tout pour rencontrer le Pape, quitte à sombrer dans la rivalité la plus crasse. C’était jouissif d’aller si loin avec un rôle a priori si sage, de jouer tous ces vices-là sans retenue. On ne s’attend pas du tout à ça au départ, mais je pense que ça la rend plus humaine.»

C’est d’ailleurs en trichant et en sombrant dans l’orgueil qu’elle se lie aux autres sœurs…

«Exactement! Elle remplit sa mission divine en tombant dans ses travers humains. C’est ce que raconte le film. Que ce serait bien dommage de gommer nos défauts car c’est l’ADN de notre société. Même chez les bonnes sœurs!»

Il y a eu beaucoup d’improvisation pendant le tournage?

«Un peu mais pas tant que ça. C’est très écrit finalement, mais Laurent nous laissait faire des prises sans direction parfois. Quand un réalisateur donne cette opportunité, je la saisis tout de suite. On ne sait jamais ce qui va sortir, c’est excitant! Le truc à garder en tête, c’est de rester dans l’enjeu narratif de la scène, sinon ça cabotine.»

Étiez-vous surprise en découvrant que l’actrice danoise Sidse Babett Knudsen incarnerait le rôle de votre rivale, Sœur Joséphine?

«Alors elle, je l’adore! Je la connaissais de la série ‘Borgen’ bien évidemment, dans laquelle elle est excellente. J’ai trouvé ça merveilleux que Laurent (Tirard, le réalisateur, ndlr) la choisisse, justement parce qu’elle n’est pas le visage auquel on peut s’attendre dans une comédie. Mais c’est une actrice hors pair, elle peut donc tout jouer. Il suffisait d’un peu d’imagination. Et on ne s’est rien refusé dans le duo, on s’est vraiment laissées aller à la rivalité. Mais vraiment, quand elle arrivait toute propre sur elle devant moi, une partie de mon corps se disait: ‘Qu’est-ce qu’elle m’énerve la Joséphine’ (rires)! C’était super de tout pouvoir lâcher. Surtout que Sidse est une vraie boxeuse dans ses interactions. Elle ne m’a pas épargnée, et c’est tant mieux!»

Aviez-vous d’autres rôles de religieuses en tête pendant la fabrication du film?

«Pas vraiment, même si comme tout le monde, j’adore la bonne sœur qui part en délire dans sa Citroën dans ‘Le Gendarme de Saint-Tropez’! Et celle de ‘La Grande vadrouille’ avec ses citrouilles aussi, tiens! Elles me font rire, que voulez-vous. C’est tellement inattendu de les voir conduire comme des allumées. C’est un ressort de rêve pour la comédie.»

Avez-vous peur de froisser des sensibilités avec ‘Juste Ciel’?

[Sans hésitation] «Non, alors là pas du tout! En termes de comédie, il y a quand même une tradition qui remonte à ‘Don Camillo’. C’est justement en présentant ces agents du Christ avec des défauts grossis à la loupe qu’on les rend plus attachants. Et puis, on ressent tous un peu l’Église dans notre éducation, ça nous appartient en quelque sorte. On se moque de nous-mêmes à travers elles. Et si on ne peut plus rire du Pape, excusez-moi, mais autant fermer la boutique (rires).»

Vous êtes-vous renseignée sur la vie des religieuses chrétiennes en 2023 pour vous préparer?

«Pas moi, mais Laurent si. Par exemple, les Bénédictines sont un peu plus libres que les sœurs venant d’autres ordres. Ce sont les plus ‘fun’ entre guillemets (rires)! On fantasme facilement sur leurs vies parce qu’elles sont assez secrètes, mais ce sont des personnes comme vous et moi.»

JUSTE CIEL

Sœur Véronique (Valérie Bonneton) a les nerfs en boule. Elle a pour mission de maintenir l’ordre dans son couvent mais perd toute son énergie entre la chasse au miracle de Sœur Béatrice (Guilaine Londez), ses querelles avec l’austère Sœur Augustine (Camille Chamoux) et le chaos engendré par l’arrivée d’une stagiaire n’ayant jamais lu la Bible. Sur papier, ça fait rêver! Mais ‘Juste Ciel’ passe à côté de toutes ses divines intentions. Toutes les idées de Laurent Tirard (‘Le Discours’), comme l’esprit cartoonesque des gags ou les jeux de mots incessants sur la foi, sont amusantes mais dissonantes, et finissent par souligner la banalité de l’intrigue. C’est d’autant plus désolant qu’on sent bien que les comédiens prennent plaisir à se lâcher complètement, Bonneton en tête. Au bout du compte, on se surprend à apprécier plusieurs blagues bien senties, mais en regrettant directement la cacophonie tonale à laquelle elles contribuent. Comme quoi les voies de la (bonne) comédie sont impénétrables!

1/5

Juste Ciel sort ce mercredi 15/02 en salles

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