Nous avons vu ‘La petite sirène’ et rencontré son réalisateur : Que vaut la nouvelle adaptation de Disney ?

Disney et le réalisateur Rob Marshall sont comme les deux doigts de la main. Ils ont déjà créé ensemble ‘Pirates des Caraïbes: La fontaine de jouvence’, ‘Into the Woods’ et ‘Le retour de Mary Poppins’, notamment. Marshall était donc le réalisateur idéal pour redonner vie à ‘La petite sirène’, avec dans le rôle principal, Halle Bailey, cinq fois nommée aux Grammys.

par
Ruben Nollet
Temps de lecture 5 min.

Rob Marshall : «Halle était la première à être invitée pour une audition. Lorsqu’elle est entrée dans la pièce, elle a fermé les yeux et s’est mise à chanter ‘Part of Your World’, la chanson d’Ariel dans le film. Je n’en croyais pas mes oreilles. On sentait qu’elle avait une connexion profonde avec les thèmes de cette chanson. Tant d’émotion. Je me suis dit ‘Cela ne fait que cinq minutes que nous avons commencé les auditions. Avons-nous déjà trouvé Ariel?’ Mais c’était ça. Nous avons ensuite rencontré des centaines d’autres actrices, mais personne n’a surpassé Halle.»

Le film contient quelques nouvelles chansons. Comment les avez-vous choisies?

«Ce qui frappe dans le film d’animation original, c’est qu’Ariel n’a au fond qu’une seule vraie chanson. Il fallait y ajouter quelque chose, du fait aussi que le live-action est différent de l’animation. Le défi était qu’Ariel perd sa voix à mi-film et ne peut, en principe, plus chanter. Mais nous avons réalisé que, dans un film, on peut aussi faire entendre la voix intérieure de quelqu’un, par le biais de la musique, d’une chanson. Cela nous a aidés à exprimer les sentiments d’Ariel quand elle arrive sur la terre ferme pour la première fois.»

Comment se fait-il que Javier Bardem, qui joue le Roi Triton, n’ait pas de chanson?

«En réalité, il en avait une, mais elle a disparu au montage, hélas. Très dommage, car Javier a vraiment une bonne voix. J’aime travailler avec des acteurs qui n’ont jamais fait de comédies musicales. Ils s’appuient sur leur personnage, et c’est la bonne approche. Ils donnent vie à une scène en chantant. Et ils ne s’en rendent même pas compte. Melissa McCarthy [la méchante Ursula dans le film, rn] le faisait aussi. Beaucoup d’acteurs ont peur de chanter, mais elle n’avait absolument aucune crainte.»

Comment fait-on en sorte que les acteurs ne se sentent pas écrasés par une production gigantesque?

«Les comédies musicales sont hybrides, un mélange de théâtre et de cinéma. Vous ne pouvez pas simplement apparaître à l’écran et commencer à chanter. Cela s’apprend. Pareil pour la chorégraphie. Il y a donc beaucoup de répétitions en amont. Je viens du théâtre et je sais que c’est mon boulot de protéger mes acteurs. Ils doivent se sentir en sécurité et comprendre que ce n’est pas grave de faire des erreurs. Que tout le monde s’en fiche. Ainsi, ils s’améliorent. C’est pour moi le plus important.»

Le cinéma est normalement plus intime que le théâtre, la caméra permettant d’être bien plus proche des acteurs. Mais avec une comédie musicale comme ‘La petite sirène’, peut-on encore garder ce côté intime?

«Je le pense. C’est une production massive, mais si vous regardez scène par scène, ce n’est souvent qu’une petite histoire. Il s’agit d’un père et sa fille. Un père qui doit apprendre à lâcher son enfant. Et puis cela parle aussi de deux âmes sœurs qui veulent changer le monde et montrer qu’il ne faut pas avoir peur des gens qui sont différents de vous. Si vous vous focalisez là-dessus, vous pouvez plus facilement relativiser tous les aspects techniques du film.»

Mais cela reste bien sûr aussi un défi technique.

«En effet. Et c’est à cela que servent les répétitions. Tout le monde devait savoir exactement ce qu’il avait à faire. Pour les scènes qui se passent en mer, nous avons au départ répété sur la terre ferme, ensuite tout le monde était suspendu à des câbles. Avec l’équipe des cascadeurs, nous avons tout répété à l’infini, chaque petite phrase, chaque pause. C’est ainsi que s’est déroulé le tournage. Parfois, je criais ‘Action!’, les acteurs disaient deux phrases et je criais ‘Coupez!’. Puis nous changions tout, je criais à nouveau ‘Action!’ Et les acteurs disaient une autre phrase. Et ainsi de suite. C’était vraiment un puzzle, une mosaïque.»

Quelle scène avez-vous trouvé la plus difficile?

«Oh, ‘Under the Sea’ (‘Sous l’Océan’), sans le moindre doute. C’est une scène de chant et de danse gigantesque avec, au fond, un seul véritable acteur. Tout le reste, ce sont des effets spéciaux. Cela nous a pris du temps pour savoir comment nous y prendre. Ce n’est pas un hasard si c’est une des dernières scènes que nous avons tournées.»

LA PETITE SIRÈNE

La nouvelle version live-action de ‘La petite sirène’ est-elle spectaculaire? Oui. Colorée? Absolument. Bien chantée? Aussi, si vous pouvez supporter les voix typiques de Disney. Mais ajoute-t-elle aussi quelque chose d’essentiel au film d’animation ou au conte original de Hans Christian Andersen? Le réalisateur Rob Marshall rallonge le tout de 50minutes, mais hormis quelques exceptions – le nouveau rap d’Aquafina qui prête sa voix à la mouette Scuttle (Eurêka) est le clou du spectacle – ces rajouts ont surtout un effet alourdissant. Les temps forts étaient, en effet, déjà dans la version animée: le réjouissant calypso ‘Under the Sea’ (‘Sous l’Océan’), le gag et romantique ‘Kiss the Girl’ (‘Embrasse-la’), la chanson mielleuse d’Ursula ‘Poor Unfortunate Souls’. L’habillage numérique est souvent époustouflant, mais il met en lumière aussi la grande ironie de cette nouvelle adaptation qui, tout compte fait, s’avère être aussi un film d’animation. Non pas que les nombreux fans s’en soucieront.

2/5

‘La petite sirène’ sort en salles aujourd’hui.

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