‘Rose’, un film sur les troubles mentaux avec Sofie Gråbøl (‘The Killing’) à ne pas manquer

Il n’est probablement pas exagéré de dire que Sarah Lund, la très douée enquêtrice de la série policière danoise ‘The Killing’, avait l’un ou l’autre trouble mental ou social. Mais cela n’était rien comparé au personnage que l’actrice Sofie Gråbøl joue dans la comédie dramatique ‘Rose’. Prénommée Inger, celle-ci a sombré dans la schizophrénie après une histoire d’amour désastreuse.

par
Ruben Nollet
Temps de lecture 5 min.

‘Rose’ est, en majeure partie, basé sur des faits réels et vous jouez en fait la sœur du réalisateur Niels Arden Oplev. Cela doit être un peu stressant, j’imagine?

SOFIE GRÅBØL : «Il m’a fallu du temps pour comprendre comment aborder mon personnage. J’ai d’abord lu le scénario et je dois dire qu’il y avait beaucoup de choses qui ne me convenaient pas. Niels écrivait par exemple que le personnage principal marchait ‘de côté et penchée en avant, comme un crabe’. Je n’avais aucune idée de ce que cela pouvait vouloir dire. Jusqu’à ce que je rencontre la sœur en question, Maren-Elisabeth.»

Comment s’est passée cette première rencontre?

«C’était au Jutland, dans la maison familiale, avec le reste de la famille. Des gens tous très gentils, mais Maren-Elisabeth ne disait pas grand-chose. Je lui ai donc demandé si je pouvais lui rendre visite dans son institution. C’était ok, même si nous étions en pleine pandémie. J’ai alors découvert une femme avec une forte personnalité, très perspicace et lettrée, avec beaucoup d’humour. Et qui a une façon unique d’habiter son corps. Cet après-midi-là, j’ai compris ce que Niels voulait dire. Je l’ai aussi filmée un peu, durant une conversation et au piano.»

Votre Inger est-elle très proche de la vraie Maren-Elisabeth?

«J’ai beaucoup tâtonné. Au départ, je pensais que je devais complètement oublier Maren-Elisabeth. Au bout du compte, ‘Rose’ n’est pas un documentaire. Je devais trouver ma propre Inger. En même temps, je ne voulais surtout pas en faire une parodie ou la surjouer ou l’adoucir. Tous les pièges dans lesquels tombent tant de films sur les maladies mentales. Mais cette crainte avait pour conséquence que je me censurais constamment. C’était terriblement frustrant.»

Comment avez-vous surmonté cette difficulté?

«J’ai réalisé que le côté comique du film était extrêmement important.‘Rose’ balance constamment entre comédie et drame, entre humour et émotion. Ilfallait que j’arrive à mettre ça aussi dans mon personnage. Je devais être aussicrédible dans les scènes drôles que dans les scènes sombres et dramatiques. J’aidonc revisionné les petites vidéos que j’avais faites de Maren-Elisabeth, etj’ai décidé de la laisser tout de même transparaître au maximum à travers moninterprétation.»

N’aviez-vous plus peur de surjouer?

«Nous faisions beaucoup de versions différentes de la même scène, et jefaisais confiance à Niels pour choisir la bonne. Par la suite, il m’a d’ailleurs dit qu’il avait presque toujours pris la version où je me retenais le moinspossible. C’étaient les plus vraies. Inger est, tout comme Maren-Elisabeth, unpersonnage formidable car elle se fiche complètement des codes sociaux. Elle n’aabsolument aucun filtre, et c’est ce qui la rend souvent très drôle.»

‘Rose’, pour moi, parle aussi de notre façon d’aborder les personnesatteintes de troubles psychiques. Y voyez-vous cela aussi?

«Absolument. C’est un thème-clé. J’ai moi-même aussi des membres de mafamille qui sont atteints de troubles mentaux, tout comme la plupart desfamilles. Et nous avons cette tendance à protéger ces personnes d’elles-mêmes etdu monde extérieur. Dans notre société, on a recours à des médicaments. Maisselon moi, nous faisons cela aussi pour nous protéger nous-mêmes et ne pas êtreconfrontés à ces maladies. C’est complexe, comme le montre le film. Vous pouvezdire qu’il faut donner suffisamment de liberté à ces personnes, mais vous devezalors accepter le risque que cela se passe mal. Et si vous les mettez tout simplement dans une institution, vous les privez d’une vie riche. Ce qui compte, c’est que nous continuions à nous rencontrer, même si nous sommes différents.Car nous avons aussi beaucoup à offrir les uns aux autres.»

ROSE

Jouer de manière crédible une femme atteinte d’un trouble mental, est une chose. Jouer une femme avec un trouble mental que vous avez rencontrée dans la vraie vie et qui s’inspire en plus de la sœur du réalisateur, c’est une autre paire de manches. Inger, le personnage principal du film danois ‘Rose’, a la cinquantaine et passe ses journées dans une institution. Elle y est entrée alors qu’elle n’avait qu’une vingtaine d’années, après avoir été diagnostiquée schizophrène. Sa mère veut absolument la protéger des dangers du monde extérieur, mais pour sa sœur Ellen et son beau-frère Vagn, un peu d’indépendance lui ferait du bien. Ils partent donc en voyage en car à Paris, où Inger avait travaillé comme jeune fille au pair. ‘Rose’ aurait facilement pu s’enliser dans le sentimentalisme plat ou la douceur mielleuse, mais le réalisateur Niels Arden Oplev garde bien les pieds sur terre. Il peut en outre compter sur les talents de l’actrice Sofie Gråbøl, grâce à laquelle on n’oublie jamais, malgré toutes les situations drôles et réconfortantes, que ce n’est pas marrant en fait.

5/5

‘Rose’ est sorti en salles.

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