Tiken Jah: «Personne ne fera du reggae mieux que Bob Marley»

Tiken Jah Fakoly continue son combat en faveur de l'Afrique. Dans «Dernier appel», un album au son raggae-roots retrouvé, il appelle les Africains à s'unir. «Il n'y a que comme cela que notre continent se réveillera.»
par
Camille
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Votre dernier album s'intitule «Dernier appel». A qui s'adresse cet appel ?

«Aux Africains. C'est un appel à l'unité. Notre continent est un véritable paradoxe. D'un côté, il est très riche. Tellement riche, que tout le monde a besoin de lui. On le voit avec les Chinois, qui s'y installent massivement. Avec les Etats-Unis, qui ont récemment invité 40 chefs d'Etat et de gouvernement à la Maison Blanche. De même avec la France! Pourtant, sa population est très pauvre. Si nous étions unis, on ne pourrait plus nous voler nos ressources, nous les acheter à des prix dérisoires.»

La situation ne peut donc que s'améliorer?

«Nous sommes le continent de l'avenir, celui ou tout reste à faire. Mais nous devons être battants, optimistes. Si nos ancêtres avaient été pessimistes, nous serions toujours des esclaves. Si nos parents avaient été pessimistes, nous serions toujours colonisés. A nous de planter les graines d'une Afrique renaissante.»

La musique est un moyen d'y parvenir?

«Les leaders d'opinion, la société civile… Tout le monde doit se mobiliser. Nous avons la chance de vivre dans un monde globalisé, avec des outils dont nos parents ne disposaient pas. Les réseaux sociaux, la TV, doivent nous permettre de voir ce qui se fait ailleurs, afin d'y puiser l'inspiration. Bien sûr, le changement ne se fera pas en un jour. Ce sont nos enfants qui récolteront les fruits de notre travail. Mais cela en vaut la peine. Regardez ce qu'il s'est passé aux Etats-Unis. Il y a 60 ans, Martin Luther King était assassiné. Aujourd'hui, Barack Obama est à la Maison Blanche. Si on réveillait un militant des droits civiques mort dans les années 80 pour lui annoncer la nouvelles, il nous dirait de le laisser se reposer tranquillement, et de ne plus l'importuner avec des bêtises!»

Ph. Y. Lenquette

Sur «Dernier appel», on trouve une chanson avec Alpha Blondy, avec qui les relations n'ont pas toujours été faciles.

«Il y a quelques années, la Côte d'Ivoire, mon pays, a connu une grave crise. Quand ça a été terminé, j'ai appelé mon grand frère Alpha Blondy. Je lui ai dit: ‘Nous devons montrer l'exemple'. Malgré notre relation difficile, malgré le fait qu'on ne se parlait plus depuis longtemps, il fallait se réconcilier. Je l'ai donc invité pour une chanson qui appelle les membres de la diaspora à aider leur pays. Car nous avons besoin d'eux, Alpha Blondy et moi en sommes convaincus.»

Côté musique, «Dernier appel» marque un retour à un reggae-roots plus classique. Vous avez néanmoins recours aux instruments traditionnels.

«Personne ne jouera le reggae mieux que Bob Marley. Mais avec nos instruments traditionnels, on peut le renouveler. L'objectif, c'est de donner un ton africain à notre reggae. Cela vérifie d'ailleurs la prophétie de Bob Marley. Il avait prédit qu'un jour, le reggae retournerait à la source, en Afrique. Et que c'est là qu'il prendrait sa vraie place. Alors je suis très heureux de voir qu'aujourd'hui, de nombreux jeunes artistes ont recours à ces instruments.»

Depuis votre précédant album, «African revolution», vous êtes produit par Universal. Face aux critiques, vous aviez souligné que ce choix vous aiderez à porter plus loin vos idées. C'est réussi?

«L'objectif du reggae est de diffuser un message. Le mien est que tous les Africains doivent s'unir. Mais rien ne sert d'avoir un message s'il n'est pas diffusé! Aujourd'hui, mon message commence à être entendu en Afrique du Sud, un peu en Afrique de l'Ouest. Je ne regrette donc pas le choix entériné avec ‘African revolution'.»

Camille Goret

 

Couleur café se déroule ce week end à Tour et taxi. Outre Tiken Jah Fakoly, on retrouve au programme : Girls in Hawaii, Morcheeba, Burning spears, Gladiators, Keziah Jones, Alpha Blondy, Asian Dub Foundation…