Candida auris: le champignon mortel et multirésistant qui inquiète les experts

Et si un champignon représentait la prochaine menace sanitaire mondiale? Ce n’est pas le scénario d’une nouvelle série télé à succès mais bel et bien une menace prise très au sérieux par les spécialistes. Son nom: Candida auris.

par
T.W.
Temps de lecture 3 min.

En 2009, dix ans avant la Covid-19, des chercheurs japonais ont découvert et identifié pour la première fois le Candida auris, un champignon capable de provoquer une infection. Sa cible préférée? Les patients immunodéprimés dont les défenses immunitaires sont fragilisées. Son endroit de prédilection? Les hôpitaux? Sa particularité? Il peut tuer.

Un taux de mortalité compris entre 29 et 53%

Il pénètre dans la circulation sanguine des personnes immunodéprimées, par un cathéter ou une plaie par exemple. L’infection peut ensuite rapidement devenir massive et atteindre le système nerveux, les os et les organes. Selon l’OMS, le taux de mortalité de ce champignon oscille entre 29% à 53%. Concrètement, entre trois et cinq personnes sur dix infectées risquent de mourir.

Qui peut être infecté et comment?

Candida auris a un aspect terrifiant. Il se transmet fortement et il est résistant à beaucoup de traitement. Mais il est aussi invisible et peut s’accrocher à toutes les surfaces. Il peut être sur l’embout d’un thermomètre ou d’un respirateur artificiel, sur des draps ou des vêtements, et il peut rester là plusieurs semaines. Heureusement, pour la grande majorité des personnes, celles qui sont en bonne santé, il est inoffensif. «Une personne peut avoir Candida auris sur elle, et donc être colonisée, mais si elle est bien portante, il n’y aura jamais d’infection », indique à Libération Adnane Sellam, professer et chercheur au département de microbiologie, infectiologie et immunologie de l’Université de Montréal. Mais pour les personnes immunodéprimées, malades du sida ou qui suivent un traitement immunosuppresseur, comme les malades du cancer ou personnes ayant subi une transplantation, Candida auris est bien plus dangereux.

Le nombre de cas a triplé aux USA

Depuis sa découverte en 2009 au Japon, le Candida auris n’a cessé de se propager dans le monde. Dans ce contexte, il faut distinguer les cas d’infections et les colonisations (le fait de porter le champignon sur soi, mais sans infection). Des centaines de cas ont été répertoriées en Europe (la grande majorité en Italie et en Espagne).

Mais c’est actuellement aux États-Unis que la situation est la plus préoccupante. La CDC, l’agence fédérale américaine de santé publique, a récemment tiré la sonnette d’alarme. Le nombre de cas d’infections par Candida auris est passé de 476 en 2019 à 1.471 en 2021. Plus inquiétant encore, le nombre de cas résistants aux échinocandines, le médicament antifongique le plus recommandé pour le traitement des infections à C. auris, a triplé en 2021.

Et en Belgique?

Le week-end dernier, dans la Libre Belgique, le virologue Yves Van Laethem a abordé le champignon. Selon lui, il pourrait faire des ravages s’il se répandait dans les hôpitaux belges. «Il a un très bon potentiel à être un agent d’infection nosocomiale sévère causant une mortalité importante. En Belgique, les cas sont peu nombreux, mais rien n’empêche qu’ils se multiplient», a-t-il indiqué. «Le gros problème survient en cas de fongémie, c’est-à-dire quand ce champignon passe dans le sang. La mortalité est alors très importante. Pourquoi? Car comme il est résistant à la plupart des médicaments antifongiques que l’on donne en premier lieu, il faut deux à trois jours avant de se rendre compte qu’on est face à l’auris. Cela laisse du temps pour faire de la casse», a-t-il expliqué à nos confrères.

Actuellement, 30 pays répartis sur cinq continents ont répertorié des cas d’infection. Mais il est fort probable que de nombreux pays ne soient pas outillés pour dépister ce champignon et qu’en réalité, Candida auris soit présent dans un nombre bien plus important de nations.

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