Voici pourquoi faire des Barbie Noires est utile

Les enfants fonctionnent souvent par identification: leur procurer des poupées similaires à ce qu’ils sont leur permettrait de mieux s’accepter et avoir confiance en eux.

par
C.D.Z.
Temps de lecture 4 min.

Ce mardi 28 février, comme chaque année, se clôturait le Black History Month. Tel que son nom l’indique, il s’agit d’un mois dédié à l’histoire des Noirs. Il permet de se remémorer et commémorer le passé, mais également de réfléchir à des solutions pour améliorer le futur. Ce mouvement a vu le jour aux États-Unis dans les années 70. D’autres pays ont emboîté le pas (Royaume-Uni, Canada, la République d’Irlande…). Certains pays ne le reconnaissent pas encore officiellement, mais des actions ont lieu malgré tout. C’est le cas en France et en Belgique.

C’est dans ce contexte que la poupée Barbie refait parler d’elle. Jouet destiné aux enfants, il lui est reproché depuis des décennies de ne pas suffisamment représenter les Noirs. Pourtant, cela peut être grandement utile pour l’éducation et l’acceptation de soi.

Naissance de Barbie

Créée par l’entreprise Mattel, la poupée Barbie voit le jour en 1959, sous les traits qu’on lui connaît: blanche, blonde (ou brune), fine… Il fallut attendre 1967 pour voir une poupée différente et «colorée»: Francie. Elle sera autant appréciée que critiquée. Mais la première vraie poupée noire nommée Barbie est sortie en 1980. Là encore, elle laisse sceptique. Il faut dire que son apparence est loin de faire penser à celle des Afro-Américaines dont elle serait inspirée. Il s’agit en fait de la poupée blanche qui a simplement été repeinte. Elle garde donc tous les traits initiaux: cheveux longs, lisses et bouclés, taille très fine…

Pourtant, elle aura une certaine utilité pour les enfants noirs des années 80. Pour la première fois, il était concevable pour eux qu’une personne noire puisse tout faire: infirmière, astronaute, sportive de haut niveau… Les poupées représentatives ont leur importance.

Le test de la poupée

Dans les années 1940, les psychologues Kenneth et Mamie Clark ont mené une série d’expériences connues sous le nom de «test de la poupée» afin d’étudier les attitudes des enfants noirs vis-à-vis des ethnies dans une Amérique en proie à la ségrégation raciale.

Les chercheurs offraient un choix aux enfants: jouer avec une poupée noire ou blanche. Les enfants choisissaient systématiquement de jouer avec la poupée blanche. De même lorsqu’il fallait identifier la poupée qui était «gentille». Cette étude a prouvé qu’un enfant noir, dès ses cinq ans, est conscient que le fait d’être «de couleur» dans la société américaine est une marque d’infériorité.

Toujours d’actualité

En 2021, la chercheuse Toni Sturdivant a reconduit l’expérience et le résultat fut le même. «Quand il s’agissait de coiffer l’une ou l’autre des poupées noires, les filles faisaient semblant d’être des coiffeuses et disaient: ’Je ne peux pas coiffer cette poupée. Ses cheveux sont trop gros’ ou ’ils sont trop bouclés’», a noté Toni Sturdivant.

Margaret Beale Spencer, psychologue pour enfants et professeur à l’université de Chicago, a confié au Huffpost que «les parents noirs doivent souvent faire un effort conscient pour protéger leurs enfants des préjugés en ’recadrant les messages que les enfants reçoivent de la société’ sur les préférences raciales. Alors que les parents blancs ne sont pas contraints à s’engager dans ce niveau d’éducation.»

Évolution lente, mais certaine

Mattel, société créatrice de Barbie, fait des efforts pour rendre ses poupées Barbie plus «ethniquement responsables». Par exemple, dès les années 1980, la société a demandé à Kitty Black Perkins, une designer noire, de concevoir une poupée qui reflète l’esthétique et la culture populaire noire de l’époque. Une réussite: cheveux coiffés en afro, accessoires assortis à sa tenue «disco» et en vogue dans les milieux noirs… La principale chose qui lui était reprochée était sa couleur de peau, jugée plus «claire» que celle des poupées sorties précédemment.

En 2023, Mattel continue de diversifier ses jouets. Ces dernières années, la société a sorti des poupées rendant hommage à des figures emblématiques noires du passé et du présent: l’écrivaine Maya Angelou, l’aviatrice Bessie Coleman, la star du tennis Naomi Osaka, l’actrice Laverne Cox… Les poupées affichent même davantage de diversité: une est atteinte de la maladie de vitiligo, une autre est en fauteuil roulant… De quoi favoriser l’ouverture d’esprit et la tolérance chez les enfants. Le chemin reste cependant encore long.

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