Zazie: "Le retour de la corde sensible"

Avec son 9e album studio, Zazie poursuit l'exploration de son vécu et de nos vies quotidiennes. «Encore heureux» revient à une musique plus organique.
Le titre «Encore heureux» résonne comme un soulagement...
«C'est plutôt un album du désencombrement. C'est un titre à double sens. Malgré tout ce qu'on nous dit sur le monde, on est encore heureux. Et puis, encore heureux qu'on ait des amis pour aller faire les idiots en tournée. C'est ce côté un peu enfantin de la chose...»
«Cyclo» avait moins bien fonctionné. Avez-vous tiré des leçons de cet échec?
«C'est surtout la presse qui l'a interprété comme tel. Quand on est artisan en début de chaîne, on ne ressent pas les albums de la même manière. Je m'attendais à ce que Cyclo' soit moins fédérateur. Je posais beaucoup de questions dans cet album plus énigmatique. Si c'était une période plus sombre, l'expérience n'était pas triste.»
Celui-ci est-il plus solaire?
«Les thèmes ne sont pas forcément plus joyeux mais il est plus solaire dans le sens où il est moins électro, moins froid.»
Après deux albums faits chez vous, à la maison, vous êtes allée en Islande et à Santorin notamment pour enregistrer cet album. En quoi est-ce important?
«J'avais envie d'aller voir ailleurs. J'ai commencé par Santorin avec Philippe Paradis (son ancien compagnon, ndlr.) et Édith Fambuena (réalisatrice majeure en chanson française, ndlr.). L'ailleurs nous a permis d'être plus entre nous. Physiquement, vous n'êtes plus dans votre terrain. La seule langue qu'on arrive à parler en commun, c'est alors la musique. Ils sont tous les deux guitaristes et réalisateurs, ils envisagent la musique d'une manière plus globale. J'étais au clavier pour composer et eux deux ont amené quelque chose d'encore plus aérien qui m'allait bien.»
Vous ramenez des cordes dans vos morceaux...
«C'est le retour de la corde sensible (rires). Les cordes, réalisées avec mon frère Phil Baron, apportent une sorte d'ambiance cinématographique. Elles permettent d'illustrer les chansons et de les emmener dans un paysage.»
Vous parlez beaucoup des femmes dans cet album, avec notamment le morceau «Oui-filles». Vous le dédiez à votre fille?
«Je m'adresse surtout aux hommes. C'est vrai que ce n'est pas facile de nous comprendre. Dans un même corps, on veut être femme, mère, indépendante tout en rêvant à une vie comme nos grands-mères, tout en gardant ce côté fille. C'était une manière un peu joyeuse de faire une chanson sur la complexité de la féminité, mais c'est aussi ce qui engendre l'attachement à une femme. Mais ce n'est pas une chanson MLF.»
Sur la pochette de cet album vous marchez penchée dans la rue. Vous sentez-vous décalée ?
«Est-ce que c'est le monde qui penche ou moi? C'est une peu la question que je pose, mais je n'ai pas envie de trancher.»
«Encore heureux» (Mercury). En concert au Cirque royal les 1er et 2 juin 2016.