En Russie, le «Z» devient le symbole de soutien à l’armée russe et envahit l’espace public

Sur les voitures, le torse d’un athlète et jusque sur le vernis à ongles des femmes, la lettre Z envahit l’espace public en Russie.

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ATS avec rédaction en ligne
Temps de lecture 4 min.

Depuis le début de l’intervention russe en Ukraine, la lettre «Z», inscrite sur les chars de Moscou, a fait son apparition dans l’espace public en Russie: sur les voitures, le torse d’un athlète et jusque sur le vernis à ongles des femmes.

D’où vient ce «Z» ?

Si plusieurs théories existent sur sa signification, une chose est certaine: il s’agit d’un symbole de soutien à l’armée russe, dont l’apparition cristallise les passions, pour ou contre. Le «Z», une lettre latine et non cyrillique, a d’abord fait surface en étant peint sur les blindés russes avançant vers ou en Ukraine, possiblement afin de les distinguer d’équipements ukrainiens semblables et éviter les tirs amis.

Mais le signe de reconnaissance est vite devenu un symbole, se propageant sur les voitures dans les rues de Moscou, sur les vêtements ou sur les profils des Russes sur les réseaux sociaux. Et les autorités semblent vouloir encourager le phénomène.

Sur ses pages Instagram et Telegram, le ministère russe de la Défense décline la lettre en plusieurs messages: «Za Pobedu» («pour la victoire»), «Za Mir» («pour la paix»), «Za pravdu» («pour la vérité»), «Za Rossiïou» («pour la Russie»). Des médias locaux ont aussi publié une photo prise du ciel d’une soixantaine d’enfants malades, leurs familles et des soignants formant un «Z» dans la cour enneigée de leur hospice situé à Kazan, au Tatarstan.

Un gymnaste arbore le «Z»

Quelques jours plus tard, le gymnaste russe Ivan Kuliak, 20 ans, est monté sur la troisième marche du podium de la Coupe du monde de gymnastique à Doha, au Qatar, avec un «Z» fixé sur la poitrine. À côté, sur la première marche, un athlète ukrainien. La Fédération internationale de gymnastique a réagi en demandant «l’ouverture d’une procédure disciplinaire contre Kuliak pour son comportement choquant».

Le jeune athlète a pour sa part déclaré aux médias russes que si c’était à refaire «je ferais la même chose»: «Je l’ai vu porté par nos militaires et j’ai regardé ce que voulait dire le symbole. (…) Je voulais montrer ma position. En tant qu’athlète, je me battrai toujours pour la victoire et je jouerai pour la paix».

Parmi les théories sur la significations du «Z», figure aussi la possibilité toute prosaïque qu’il s’agisse de la première lettre du mot «zapad», qui veut dire «ouest» en russe, en référence aux forces armées du district occidental du pays. Enfin, certains ont aussi relevé qu’il s’agissait de la première lettre du nom du président ukrainien, Volodymyr Zelensky.

Symbole d’allégeance

Quoi qu’il en soit, des politiciens aux célébrités, en passant par certains influenceurs, chacun veut s’afficher avec son «Z», devenu un symbole d’allégeance au Kremlin. Roskomnadzor, le gendarme des médias russes, a ainsi écrit en lettre majuscule le «Z» dans son nom sur Telegram.

Dans de nombreuses régions russes, y compris reculées, les flashmobs et autres manifestations de soutien se sont multipliées sous le slogan «Nous n’abandonnons pas les nôtres», avec aussi des chorales de femmes chantant avec un «Z» sur la poitrine, des taxis affichant le «Z» à leurs fenêtres ou des voitures garées en forme de «Z».

Une habitante de Donetsk, ville dans l’est séparatiste prorusse de l’Ukraine, a aussi publié sur Instagram une photo de ses ongles peints en noir avec un «Z» blanc. Et à Barnaoul (sud), un immense «Z» a été déplié sur la neige, aux couleurs orange et marron du ruban de Saint-Georges, symbole de valeur militaire. Des esprits industrieux ont aussi flairé le bon filon et des t-shirts siglés «Z» sont désormais vendus en ligne.

Dans le camp des opposants à l’intervention militaire, les symboles sont moins visibles dans l’espace public, même si de petites manifestations ont lieu quotidiennement malgré l’interdiction. Des slogans pacifistes sont parfois inscrits à la peinture sur des murs à Moscou. Mais ils sont rapidement effacés.