Macron vs Le Pen: voici ce qu’il faut retenir du débat de l’entre-deux-tours

Emmanuel Macron s’est montré pugnace mercredi soir face à une Marine Le Pen tenace, lors d’un débat télévisé dense et acerbe, mais courtois dans l’ensemble, où les deux candidats à la présidentielle ont enchaîné les échanges âpres sur la Russie, l’économie, les prix de l’énergie ou encore l’Europe et le climat, à quatre jours du second tour.

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par
AFP
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Tout était en place: la tension dramatique avait été savamment entretenue depuis plusieurs jours et ce mercredi soir, les acteurs étaient fin prêts. Ce match retour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen pour décrocher la présidence française, cinq ans après un premier duel télévisé, devait être «décisif». Pourtant, malgré quelques escarmouches, le débat a tourné court.

Sans doute mieux préparée, Marine Le Pen n’a certes pas sombré comme en 2017, mais elle a semblé subir durant plus de 2h30 face à un Emmanuel Macron parfois hautain et toujours offensif, n’hésitant pas à attaquer la candidate du Rassemblement national (RN) sur son programme. Le président sortant a mis son adversaire sur la défensive à plusieurs reprises, l’accusant tôt dans la soirée de «dépendre du pouvoir russe» et «de Monsieur Poutine» ou encore en lui lançant lors d’un échange sur l’environnement: «Vous dites n’importe quoi».

«Vous avez été, je pense, l’une des premières responsables politiques européennes, dès 2014, à reconnaître le résultat de l’annexion de la Crimée», a dénoncé M. Macron, faisant référence à l’annexion non reconnue par la communauté internationale de la péninsule ukrainienne par Moscou. «Vous l’avez fait pourquoi? Parce que vous dépendez du pouvoir russe et que vous dépendez de M. Poutine», a-t-il ajouté dans une allusion à un prêt de 9 millions d’euros contracté en 2017 par le parti d’extrême droite de Mme Le Pen auprès d’une banque russe.

«C’est faux et c’est assez malhonnête», a rétorqué sa rivale, en affirmant qu’aucune banque française ne lui avait accordé de prêt à l’époque et qu’elle n’avait «d’autre dépendance que de rembourser son prêt». «Je suis une femme absolument et totalement libre», a-t-elle martelé.

L’Europe «une copropriété»

Europe, retraites, pouvoir d’achat, environnement, climat, sécurité, voile: les sujets ont défilé, les accusations aussi. Sans parvenir à mettre sa rivale au tapis, c’est à chaque fois le président sortant qui a marqué des points, inversant régulièrement la charge du bilan.

«Votre projet consiste à sortir de l’UE. Vous mentez sur la marchandise. L’Europe est une copropriété, on ne peut pas décider seul de ripoliner la façade», a accusé par exemple Emmanuel Macron.

Mme Le Pen venait de dire qu’elle souhaitait «rester dans l’Union européenne», mais «profondément la modifier pour faire émerger une ‘alliance européenne des nations’».

Sur le pouvoir d’achat, préoccupation numéro un des Français selon les sondages, les deux adversaires se sont accrochés sur leurs propositions respectives d’incitations à augmenter les salaires et primes, chacun accusant l’autre de faire croire que les hausses seront «automatiques». Les deux candidats se sont aussi opposés sur les méthodes pour protéger le pouvoir d’achat, notamment sur l’énergie, Emmanuel Macron défendant le «bouclier» déjà mis en place et son projet de «chèque alimentaire», Marine Le Pen prônant une baisse de TVA.

«Climatohypocrite»

«Vous dites que vous êtes très bon en économie, que les entreprises vous adorent, or il y a 400 milliards de déficit de la balance commerciale, un record absolu», a déclaré Mme Le Pen attaquant le bilan d’Emmanuel Macron. «Vous nous expliquez avoir fait beaucoup d’efforts pour les plus modestes, moi ce que je vois c’est qu’il y a 400.000 pauvres supplémentaires sous votre quinquennat, nous sommes dans un pays où il y a 9,8 millions de pauvres», a-t-elle lancé.

Emmanuel Macron et Marine Le Pen se sont aussi opposés sur l’âge de départ à la retraite, que le chef de l’État souhaite porter progressivement à 64 ou 65 ans tandis que la présidente du RN veut rester «entre 60 et 62 ans».

Les deux adversaires ont par ailleurs étalé leurs divergences sur l’écologie, Mme Le Pen accusant M. Macron d’être «climatohypocrite» tandis qu’elle était traitée de «climatosceptique».

Sur la sécurité, Mme Le Pen a parlé d’«une vraie barbarie», notamment en raison de «l’immigration anarchique et massive», ce à quoi Emmanuel Macron a répliqué que les Français ne voulaient pas «des postures».

Le ton est monté lors d’un échange sur le voile que Mme Le Pen souhaite «interdire dans l’espace public». Ce serait «une trahison de l’esprit français et de ce qu’est la République», a répliqué M. Macron.

Après quasiment trois heures de débat, Emmanuel Macron et Marine Le Pen ont enfin eu droit à leur carte blanche, ces deux minutes où ils ont pu développer librement un thème de leur choix. «Cette élection est un référendum pour ou contre l’UE, l’ambition écologique, la laïcité et la fraternité. Et un référendum pour ou contre ce que nous sommes profondément, d’où nous venons et ce que nous avons à faire. Le 24 avril, c’est un moment clair. Il faut que le choix soit clair», a dit à cette occasion le président sortant avant de consacrer ses dernières secondes aux enfants et à leur avenir.