Les trottinettes bannies de Paris: Bruxelles va-t-elle suivre?

Le rejet est massif: 90% des Parisiens ont voté contre les trottinettes en libre-service. La capitale française va donc bannir ces engins de micro-mobilité de ses rues. Bruxelles va-t-elle lui emboîter le pas?

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Que se passe-t-il à Paris?

Dangereuses quand elles sont mal conduites, abandonnées n’importe où, avec un bilan carbone plutôt mitigé… Les trottinettes électriques en libre-service n’ont pas toujours bonne presse. À Paris, elles ont même cristallisé une farouche opposition. Les Parisiens ont voté à près de 90% pour l’interdiction de ce nouveau mode de déplacement urbain lors d’une consultation citoyenne.

La maire de Paris Anne Hidalgo (PS) s’était engagée «à respecter purement et simplement le résultat», quel qu’il soit. Paris va donc devenir la première capitale européenne à complètement interdire ces deux-roues, à la fin des contrats liant la ville aux trois opérateurs privés Lime, Tier et Dott, le 31 août prochain.

Ainsi, dès le 1er septembre, plus une seule trottinette partagée ne circulera à Paris. Chez nous, ces deux-roues ont également leurs détracteurs. Alors, va-t-on aussi en arriver là à Bruxelles?

Que dit Bruxelles?

L’interdiction de ces engins n’est pas à l’ordre du jour dans notre capitale. Bruxelles adopte une approche différente, préférant miser sur l’encadrement, la sensibilisation et le déploiement de drop zones. Grâce à sa nouvelle politique, la Région entend agir sur les deux points problématiques majeurs: le stationnement sauvage et la sécurité routière.

Les drop zones, solution au conflit?

Côté stationnement, le parlement bruxellois a récemment adopté une législation fixant le nombre de trottinettes autorisées et introduisant des zones «drop off». Le stationnement des engins sur ces drop-zones sera donc prochainement obligatoire (l’arrêté d’exécution suivant son cours, avec une adoption finale attendue avant l’été).

Concrètement, l’usager n’aura d’autre choix que de ranger son deux-roues dans l’une de ces zones de stationnement. Autrement, l’opérateur ne mettra pas fin à sa location. Dès que ces drop zones seront en nombre suffisant, le stationnement sera automatiquement rendu impossible partout ailleurs.

Les drop zones seront installées environ tous les 300 mètres, suivant les recommandations régionales. Sauf dérogation exceptionnelle, elles ne prendront pas place sur les trottoirs mais bien sur les voiries. «Nous privilégions les espaces disponibles situés avant et après les passages pour piétons. De la sorte, cela empêche des voitures de s’y garer. Cela améliore la visibilité des piétons. C’est bon pour tout le monde et notamment pour la sécurité routière», illustre Camille Thiry, porte-parole Bruxelles Mobilité.

Au total, près de 3.000 dropzones seront aménagées sur le territoire bruxellois, réparties entre les communes. Rien qu’à Bruxelles-ville, 681 emplacements devraient voir le jour. À ce stade, une centaine de dropzones ont déjà été créées et elles seront un millier à être opérationnelles cet été.

De nouvelles règles

Autre volet: la sécurité routière. Afin de renforcer la sécurité de tous les usagers dans l’espace public, la réglementation a évolué. Ainsi, depuis juillet 2022, les usagers des trottinettes électriques sont assimilés à des cyclistes et doivent donc circuler sur les infrastructures cyclables et la chaussée. La vitesse maximale a été réduite de 25 à 20 km/h (8km/h dans les zones piétonnes). Il est en outre interdit de circuler à deux (voire plus) sur un engin.

Bruxelles Mobilité a d’ailleurs lancé fin mars une campagne de sensibilisation afin de rappeler quelques règles élémentaires aux usagers: respecter les feux rouges, ne pas rouler en ayant consommé drogue et/ou alcool, ne pas se faufiler dans la circulation…

Quelles perspectives?

Dans les rangs de l’opposition, on appelle déjà à un tour de vis supplémentaire. En effet, le MR bruxellois réclame notamment une augmentation des amendes et sanctions liées aux infractions ainsi qu’un renforcement du contrôle, allant jusqu’à l’exclusion des contrevenants grâce à l’immatriculation des trottinettes (pour l’heure, non imposée). Autres exigences des libéraux: la détection automatique des trottinettes sur les trottoirs, la détection d’une double occupation sur un engin et l’exigence de la carte d’identité au moment de l’inscription.

Le gouvernement bruxellois entend, lui, se donner le temps d’évaluer le renforcement des règles et les nouvelles dispositions en matière de stationnement. La ministre de la mobilité bruxelloise Elke Van den Brandt (Groen) a toutefois averti: si, malgré ces mesures, «il n’y a pas d’amélioration en termes de sécurité routière et de respect des autres usagers d’ici un an, des mesures plus strictes seront envisagées», a-elle assuré.

Que disent les chiffres?

Les trottinettes électriques ont souvent mauvaise réputation. Que disent vraiment les chiffres de la sécurité routière en Belgique? Chez nous, on dénombre en moyenne cinq accidents par jour avec un utilisateur de trottinette électrique. En 2022, l’Institut pour la sécurité routière VIAS a recensé 1.715 accidents impliquant ce mode de transport, soit une hausse de 63% par rapport à l’année précédente. Un chiffre qui est probablement sous-estimé, souligne Vias, puisque nombre d’utilisateurs n’appellent pas la police après leur chute, ne laissant aucune trace de leur accident dans les statistiques officielles.

En 2022, quatre utilisateurs de trottinettes électriques sont décédés dans un accident de la circulation. Quatre également en 2021.

Ces chiffres sont à mettre en parallèle avec le nombre toujours croissant d’utilisateurs de ces engins de mobilité douce. En effet, force est de constater que les trottinettes sont de plus en plus utilisées dans les rues de notre capitale. En juin dernier, 1,5 million de locations ont ainsi été effectuées, contre une moyenne mensuelle de 100.000 locations en 2021. Quelque 23.000 engins de ce type se trouvent en libre-service aujourd’hui à Bruxelles.

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