C’est quoi la «ville à 10 minutes» que Bruxelles veut devenir?

Vous en avez marre de courir en tous sens et de perdre votre temps dans les trajets? La «ville du quart d’heure», qui vise à redonner un visage humain aux grandes villes, est peut-être la solution. Bruxelles entend se réapproprier ce concept durable pour se transformer en une «villeà 10 minutes»: une ville flexible et adaptable, où les citadins se reconnectent entre eux.

par
Oriane Renette
Temps de lecture 4 min.

De Paris à Hong Kong, en passant par Los Angeles et Stockholm, de nombreuses villes se transforment selon une mesure: celle du temps. Qu’il s’agisse de la ville du quart d’heure de dix minutes ou même d’une minute, l’objectif est de faciliter le quotidien des habitants urbains, de réduire leur temps de trajets, leur impact carbone, tout en créant du lien social.

C’est quoi le chrono-urbanimse?

La vision de la ville par le prisme de la temporalité porte un nom: le «chrono-urbanisme». Spécialiste de la ville intelligente, le scientifique Carlos Moreno rappelle le concept de «la ville du quart d’heure»: une organisation urbaine permettant aux habitants d’avoir accès aux besoins et services essentiels en 15 minutes de marche ou de vélo. Domicile, travail, loisirs, commerces, lieux culturels, espaces verts… Le tout accessible en quelques minutes et conçu de manière dynamique pour encourager les rencontres.

Cette façon de penser l’usage de l’urbain vient casser le modèle fonctionnel imaginé par Le Corbusier, où la séparation des quartiers selon leurs activités amène à «une course permanente pour tenter d’articuler vie personnelle et professionnelle et se resynchroniser avec les autres», selon les mots du géographe et urbaniste Luc Gwiazdzinski. Avec la ville des minutes, l’expérience de vie des citadins redevient la principale préoccupation dans l’aménagement urbain.

Comment Bruxelles veut se l’approprier?

Chez nous, Bruxelles s’est emparé du chrono-urbanisme pour se redessiner comme «ville à dix minutes». À travers ce concept, ses objectifs sont donc de renforcer le réseau de services de proximité, d’améliorer la qualité de vie de ses citoyens en misant sur l’hyperlocal, de retisser du lien social et de répondre aux inégalités socio-spatiales de la ville. Le tout en réduisant la mobilité motorisée, contribuant de ce fait à la diminution de son bilan carbone.

Mais comment savoir où sont réellement les besoins en termes de services et d’infrastructures? Pour assurer une répartition la plus efficace possible, la ville de Bruxelles s’est alliée à pas moins de cinq universités (ULB, KU Leuven, UCLouvain, VUB, USL-B) pour mettre au point une cartographie de la ville. Cet outil permettra d’identifier les besoins par quartiers et d’analyser l’offre actuelle. Par extension, d’identifier les déséquilibres en matière d’offre et de demande d’infrastructures publiques. Ensuite, il s’agira de veiller concrètement à ce que tous les quartiers soient bien équipés.

Que trouvera-t-on «à dix minutes»?

Dans la vision de la ville à 10 minutes, le fil conducteur est bel et bien la proximité: faire en sorte que toutes les commodités soient à moins de 10 minutes à pied ou à vélo pour ses habitants. Mais de quels services parle-t-on exactement?

Quatre thématiques ont été retenues pour entrer dans la catégorie «ville à 10 minutes». Au total, elles intègrent quelque 180 types d’équipements collectifs et de services différents.

1. Le vivre ensemble: écoles maternelles et primaires, crèches, centres culturels et sportifs, cabinets de médecin et maisons médicales, maisons de repos…

2. L’économie résidentielle: commerces alimentaires, librairies, pharmacies, points poste, distributeur de billets,etc.

3. L’environnement et le cadre de vie: espaces verts, plaines de jeux, potagers collectifs…

4. La mobilité: transports en commun, parkings vélos, stations de voitures ou vélos partagés…

Où en est-on?

Selon les premières analyses basées sur le modèle 10 minutes, 80% des Bruxellois ont un accès «bon», «très bon» ou «parfait» aux équipements et services publics. «On a déjà une belle couverture», se réjouit le bourgmestre de la Ville de Bruxelles, Philippe Close (PS), dans les colonnes du Soir. L’outil de cartographie est toujours en développement au sein de l’administration communale. Une version accessible au public sera disponible à la fin de l’année 2024. «C’est la première fois que nous disposons d’un modèle aussi scientifique pour valider ou influencer nos politiques», poursuit le bourgmestre. «LaVilleàdixminutesn’est plus un slogan, elle se matérialise dans les quartiers à travers cette carte. Chacun pourra se pencher sur sa rue ou son quartier et interpeller le collège pour dire qu’il manque ceci ou cela», précise-t-il.