Pourquoi faire la navette vous fait en réalité du bien

Le trajet de notre domicile à notre lieu de travail nous semble parfois être des heures perdues pour rien. Pourtant, ces trajets regorgent de bénéfices insoupçonnés pour notre santé mentale. Explications.

par
Oriane Renette
Temps de lecture 4 min.

45 minutes: c’est le temps que la moitié des Belges consacre chaque jour à faire la navette entre leur domicile et leur lieu de travail. Un sur cinq y passe même deux heures par jour. Ce temps passé dans les transports en commun est bien souvent considéré comme une corvée, comme une pure perte de temps. D’ailleurs, depuis la pandémie de coronavirus, le recours au télétravail a explosé. Si pour de nombreux travailleurs il permet indiscutablement un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle, il nous prive aussi de ces allers-retours. Et ce n’est pas forcément une bonne chose. Car en effet, les trajets domicile-travail apportent leur lot de bienfaits en termes de santé mentale. Dans une récente étude américaine, deux chercheurs ont décortiqué tous ces bénéfices dont profitent les navetteurs réguliers.

Une zone de transition essentielle

Le trajet domicile-travail permet de marquer la transition entre le mode «boulot» et le mode «maison». Et cette transition n’est pas négligeable d’un point de vue psychologique. Elle constitue ce que les chercheurs appellent un «espace liminal», c’est-à-dire un espace dans lequel les navetteurs ne sont «ni pleinement engagés dans leurs pensées et comportements liés travail, ni dans ceux liés à la maison».

En étant doublement libéré, à la fois du rôle professionnel et du rôle privé, ces trajets nous offrent donc une véritable occasion de récupérer. Ils nous permettent aussi de switcher mentalement plus facilement vers le domaine du privé à la fin du trajet, comme l’expliquent Kristie McAlpine et Matthew Piszczek, chercheurs en management et auteurs de l’étude, dans le média The Conversation.

À travers leur étude, ils ont mis en évidence les deux procédés cognitifs qui sont activés en faisant la navette. D’une part, le détachement psychologique, qui nous permet de nous désengager des demandes et exigences liées au travail. D’autre part, la récupération psychologique, qui nous permet de refaire nos stocks d’énergie mentale, bien souvent épuisés après une journée de dur labeur.

Faire la navette représente donc un processus quotidien important dont les télétravailleurs sont privés. «Sans cette capacité de basculer mentalement d’un univers à l’autre, les frontières entre les rôles s’estompent, ce qui peut être source de stress. Et si les gens ne se désengagent pas mentalement du travail, ils peuvent se retrouver en burn-out», préviennent les auteurs.

Facteurs de stress et facteurs de relaxation

Sans grande surprise, ils ont également mis en évidence que plus les trajets sont longs, plus on dispose de temps pour se détacher et récupérer. Mais leur recherche montre que ce n’est pas tant le temps du trajet qui importe. C’est surtout le stress que celui-ci peut engendrer.

Car si le trajet est plus stressant qu’à l’accoutumée (parce que l’on se retrouve coincé dans les embouteillages, que le train a du retard ou que l’on a raté son métro, par exemple), ses effets bénéfiques seront moindres. Kristie McAlpine et Matthew Piszczek conseillent donc de privilégier avant tout le trajet le moins stressant, peu importe sa durée.

Les chercheurs se sont en outre demandé ce qui pouvait favoriser d’autant plus ces phénomènes de récupération et de détachement. «Pour améliorer leur niveau de détente durant le trajet, les navetteurs devraient éviter de ruminer sur leur journée de travail», conseillent les auteurs. «Ils devraient plutôt se servir de ce temps libre pour faire des choses qui favorisent leur épanouissement personnel: écouter de la musique ou des podcasts, lire un roman, appeler un ami…». Ou encore lire votre journal Metro!

En télétravail, que faire ?

Les télétravailleurs se retrouvent donc privés de ces bénéfices liés au trajet domicile-travail. Dès lors, que peuvent-ils mettre en œuvre pour favoriser la transition de rôle du professionnel vers le privé, et vice-versa? «Les télétravailleurs ont tout intérêt à se créer leur propre forme de ‘navette’, et ce afin de s’assurer cet espace liminal consacré à la récupération et à la transition», conseillent les chercheurs. «Comme une marche de 15 minutes pour marquer le début et la fin de journée de travail», illustrent-ils.

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