Royal Blood sort l’un des albums rock de l’année: «Nous avons créé un lien indéfectible»

Il est rare de voir un duo marquer de son empreinte le rock, dominé par les bands d’au moins trois musiciens. Mike Kerr et Ben Thatcher avaient pourtant fait forte impression avec leurs premiers albums, et étaient attendus au tournant pour ce troisième volet. Les deux complices se sont risqués à une nouvelle façon de faire la musique avec «Typhoons». Le résultat, c’est un enchaînement de hits irrésistiblement dansants.

par
Sébastien Paulus
Temps de lecture 5 min.

Après dix ans de carrière, est-ce qu’on peut dire que la sortie du titre «Trouble’s coming» est un tournant?

Ben Thatcher : «Absolument. C’est avec ce morceau que le troisième album est né à nos yeux. Nous avons directement été excités de ce qu’il représenterait et des nouvelles sonorités que nous allions explorer. Cela nous a donné une nouvelle direction pour composer le reste de l’album et c’est donc naturellement le premier titre que nous avons décidé de sortir.»

Les deux premiers albums avaient une énergie très similaire, mais, cette fois-ci, vous bousculez tous les codes que vous aviez établis. Etait-ce un changement nécessaire?

«Je n’ai pas trouvé que le changement était drastique, mais c’est certain qu’il y a une évolution. En tant qu’artiste, tu dois te développer et prendre des risques. Si tu ne le fais pas, tu restes dans ta zone de confort et ce n’est pas intéressant. Nous n’allions pas recréer éternellement ce que nous avions fait par le passé. Quand on sortait d’un concert et qu’on rejoignait notre bus de tournée pour faire la fête, on écoutait de la pop, de la funk… de la musique dansante! Ça nous a amenés à nous demander pourquoi est-ce que l’on n’amènerait pas cet élément, cette sorte de «french dance», sur scène.»

Cette envie d’amener une «french touch» vient-elle de votre admiration pour des groupes comme Justice et Daft Punk?

«Ces groupes, on les admire et on a notamment eu la chance de devenir amis avec Justice, qui sont deux types incroyables. Leur musique, c’est presque du métal avec des claviers, des guitares et de la batterie. Leur façon d’interpréter la musique est incroyable, donc incorporer ça à notre façon de faire la musique, c’était naturel. Pour ce qui est de Daft Punk, leur musique ne mourra jamais. C’est certain qu’ils vont nous manquer et qu’ils ont eu une influence sur nous.»

Est-ce que l’accueil très positif de vos fans lors de la sortie des premiers morceaux vous a encouragé à poursuivre dans cette direction?

«C’est certain. Ça a été très réconfortant de voir qu’ils nous soutenaient à fond dans cette nouvelle aventure. On pensait que nos fans de la première heure allaient être plus durs avec nous, mais on remarque que la consommation de la musique est maintenant très différente. Cela nous permet de toucher des publics beaucoup plus variés, qui apprécient énormément ce qu’on leur propose.»

Côté batterie, vous jouez de façon beaucoup plus subtile que par le passé. Cela a-t-il été frustrant de ne pas pouvoir tout donner sur votre set?

«Ce sont ces éléments assez subtils qui font toute la différence sur l’album. Ils ont ouvert un nouveau champ des possibles pour nous et cela a humanisé la batterie qui peut sembler froide aux premiers abords. Pour moi, ça a été un nouveau défi parce que ça change complètement la façon de jouer. De l’extérieur, cela peut sembler plus simple que quand je frappe dans tous les sens, mais c’est l’inverse!»

Ce qui ne change pas, c’est l’alchimie que vous avez avec Mike sur scène et en dehors. Est-ce qu’elle existerait si vous n’étiez pas de bons amis?

«Avant toute chose, nous sommes amis. Notre rencontre musicale est presque le fruit du hasard, puisque l’on a joué ensemble dans plusieurs groupes avant d’essayer de jouer à deux. C’est pour un événement que je lui ai un jour demandé de faire un duo basse-batterie, mais on a essayé de nombreuses choses ensemble avant d’aboutir à cette alchimie musicale. Quand Royal Blood est né, c’était la chose la plus naturelle au monde.»

La notoriété que vous avez rapidement acquise a-t-elle été difficile à gérer pour garder cette amitié en vie?

«Non, c’était plutôt le contraire. Nous venons de petites villes où il n’y avait pas grand-chose à faire, avec des parents de la classe ouvrière. D’être projetés dans ce style de vie rock’n’roll à deux était très fun et complètement fou. On discutait tous les jours de la chance que l’on avait et tout cela ne nous a jamais éloignés. Les choses exceptionnelles que l’on a vécues ont créé un lien indéfectible que nous sommes les seuls à pouvoir comprendre.»

En quelques lignes

Après deux albums qui s’inscrivaient dans la même lignée, Royal Blood était attendu pour son troisième bébé. Les deux Anglais sont parvenus à garder ce qui fait l’essence du groupe, tout en ajoutant une touche terriblement rafraîchissante à leur musique. C’est bien simple: Ben et Mike prouvent avec «Trouble’s coming» qu’ils sont plein de ressources et qu’ils auront toujours la créativité nécessaire pour nous surprendre. C’est indubitablement l’un des albums rock de l’année.